Derrière une porte bleue anonyme, nichée entre les bâtiments de Chancery Lane, quartier historique où Charles Dickens travaillait autrefois comme employé, se cache un monde souterrain qui est resté un secret bien gardé pendant des décennies. À 30 mètres de profondeur, un réseau de tunnels long d’un kilomètre et demi s’étend sous la ville, dont l’accès a été limité pendant des années par la stricte loi britannique sur les secrets officiels. Aujourd’hui, cependant, ce réseau caché est en passe de devenir l’une des attractions touristiques les plus fascinantes de Londres.
Sommaire
Un héritage secret
CNN a eu le privilège de descendre dans les London Tunnels pour une visite exclusive, accompagnée d’Angus Murray, PDG du projet de réaménagement.
Les travaux, qui représentent un investissement de 149 millions de dollars, transformeront plus de 8 000 mètres carrés de tunnels en un espace multifonctionnel, un pôle culturel qui abritera des musées et des galeries d’art, le mémorial et le « bar le plus profond du monde » – nous verrons plus tard de quoi il s’agit – pour ce qui s’annonce comme l’une des nouvelles attractions les plus spectaculaires au monde.
Ce qui rend ce spectaculaire labyrinthe de béton encore plus fascinant, c’est son lien avec le personnage légendaire de James Bond. Les London Tunnels ont inspiré la Q Branch (plus tard Q Division), le laboratoire secret qui abritait la division de recherche et développement du British Secret Service – les services secrets britanniques, Secret Intelligence Service (SIS), communément appelés MI6 – chargée de créer l’équipement spécial destiné aux agents secrets : c’est ici que, dans les romans de Ian Flaming, 007 se procurait ses gadgets prodigieux.
En 1944, avant de devenir écrivain, Fleming lui-même travailla dans les London Tunnels en tant qu’officier de liaison de la marine britannique.
De la guerre aux télécommunications
Construits entre 1940 et 1942, les tunnels devaient servir d’abri anti-aérien et, en cas d’attaque, pouvaient accueillir jusqu’à 8 000 personnes. En réalité, ils n’ont jamais été utilisés à cette fin, car pendant la guerre, la menace nazie s’est déplacée vers l’Union soviétique.
Dans les années qui suivirent, les London Tunnels furent utilisés pour des opérations secrètes du Special Operations Executive, une unité créée pour mener des missions de sabotage derrière les lignes ennemies. Après la guerre, le réseau fut adapté à un nouvel usage : en 1949, il devint le Kingsway Telephone Exchange, un nœud stratégique pour les communications britanniques.
Au cœur de la guerre froide, ces tunnels abritaient la ligne téléphonique qui reliait directement Washington et Moscou, également utilisée pendant la crise des missiles cubains de 1962. Plus de 200 opérateurs géraient deux millions d’appels par semaine dans un enchevêtrement de câbles, d’équipements électroniques et de salles d’opération.
Un bar secret et une salle de jeux souterraine
Au fil des ans, le site est passé sous le contrôle de British Telecom et s’est transformé en centre technologique. Et c’est là que l’histoire prend une tournure presque surréaliste : parmi les innovations des années 80, les tunnels abritaient le bar le plus profond du monde, réservé aux employés du gouvernement. Un coin de détente inattendu, avec une salle de jeux équipée de tables de billard et même d’un aquarium tropical.
Avec le temps, les technologies de pointe ont rendu le centre téléphonique obsolète et les tunnels ont été abandonnés. Aujourd’hui, cependant, ils sont sur le point de connaître une nouvelle vie, grâce à un projet qui vise à les transformer en une expérience immersive entre passé et futur.
L’avenir des London Tunnels
Murray et son équipe ont une vision ambitieuse : attirer trois millions de visiteurs par an, un objectif qui placerait cette attraction au même niveau que la National Gallery et même devant la Tour de Londres. Le projet prévoit un parcours d’exposition qui mêlera histoire, art et technologie.
Outre les sections consacrées à la Seconde Guerre mondiale et à la guerre froide, le projet comprend des espaces pour des expositions d’art contemporain, des installations interactives et des spectacles numériques. Une zone entière sera consacrée aux illusions d’optique et aux expériences sensorielles, grâce à l’utilisation de projecteurs 3D et de diffuseurs de parfums pour évoquer des décors historiques.
Et puis il y a le bar. L’idée est de recréer l’atmosphère des anciens repaires secrets de Londres, avec une touche moderne et spectaculaire. Un endroit parfait pour faire une pause entre deux expériences, peut-être en sirotant un Martini – secoué, pas remué, dans le plus pur style Bond.
Une nouvelle attraction pour Londres
Si tout se passe comme prévu, la construction débutera au troisième trimestre de l’année prochaine et l’ouverture au public aura lieu d’ici 2028. Un projet ambitieux, certes, mais avec un potentiel énorme.
Après tout, qui pourrait résister au charme d’un monde secret, caché sous Londres, qui recèle des histoires de guerre et d’espionnage, avec James Bond en toile de fond ?